Les fabriques

Extrait du catalogue sur la faïence et la terre vernissée d’Auvillar (2015 – Jean Darrouy).

L’activité de poterie d’Auvillar est attestée au moins à partir de la fin du XVIIe siècle. En 1739, Jean-François du Gout, chevalier de Lassaigne, présente une requête pour faire travailler une manufacture de faïence dans la juridiction d’Auvillar. Dès la fin de l’année 1739, on y note la présence à Auvillar de plusieurs faïenciers et peintres : Claude Turcas, Nicolas Dubourdieu, originaire de Samadet, qui fondera la faïencerie de Thiviers vers 1755, et Joseph Delondre, venant de Martres-Tolosane. Cette fabrique n’a pas été localisée et nous ne savons rien sur les faïences produites par ce centre faïencier.

Faïencerie de la Rue St-Pierre

Il s’agit de la fabrique Ducros, située face à l’église paroissiale d’Auvillar, quartier St-Pierre.

Fabrique Ducros

En 1753, on trouve trace dans les registres paroissiaux, de la présence de François Ducros, au mariage du faïencier Antoine Maurin à celui de sa cousine Antoinette Ducros, avec le titre de “maître faïencier”. Mais le nom de François Ducros apparait dès 1745 dans les registres paroissiaux, il a alors 19 ans et est porte le titre de faïencier. Il a un oncle marchand potier Jacques Ducros, frère de son père Guillaume Ducros, marchand bonnetier. De plus, dans les actes notariés, on trouve aussi le nom de Jean Damour, marchand faïencier en 1749. La fabrique de François Ducros a donc été créée entre 1745 et 1749. En 1762, François Ducros apparait “fermier de la faïencerie”. Il dirige donc lui-même sa fabrique, et non pas pour le compte de Lamothe-Vedel. François Ducros décède en 1790 et son fils Guillaume lui succède. Le fils de Guillaume, François, s’associe avec son père, jusqu’au décès de Guillaume en 1826. En 1841, les affaires vont mal, et en 1844, Antoine Charme Castex rachète la fabrique, et parvient à la redresser rapidement. Son deuxième fils Jean Eloi, qui se fait appeler Jean Maxime, puis Maxime se verra attribuer la faïencerie.
Lors de la visite d’Edouard Forestié à Auvillar en 1872, la fabrique fonctionne toujours sous la direction de Maxime Castex. Il décède en 1902.

Portrait de Maxime Castex
Soupière en camaieu bleu
Auvillar bassin Rigal
Bassin de Mathieu Rigal – vers 1770
Plat François Ducros petit-fils

Faïencerie de Mondou et de Lance

Antoine Taillard fonde vers 1769 sur la commune de St-Loup, au lieu-dit de “Mondou”, sa fabrique de faïences. A la révolution, il en ouvre une autre à Lance, lieu-dit à Auvillar, au bord de la Garonne. Ses trois fils se verront devenir propriétaires des différentes fabriques au fil des ans, mais de nombreuses difficultés financières vont perturber leurs fonctionnement.
En 1851, Pierre Saint-Martin en devient le propriétaire, et son fils également prénommé Pierre deviendra tuilier en 1860, puis briquetier en 1863, tout en continuant à fabriquer des terres vernissées.
Etienne Taillard, l’un des fils d’Antoine Taillard, ouvre une seconde fabrique à Lance, juste à côté de celle de son frère François. Son fils Jean Eucher prend sa succession avant 1833.

Plat fabrique Taillard

Faïencerie de la Rue Jonqua

Antoine Serres crée une fabrique de faïence rue Jonqua en 1787, mais il était déjà “facturier en faïence” à Mondou avant 1779. Sa soeur Marie Serres se marie avec Mathieu Rigal en 1758. Antoine Serres devait donc travailler chez Ducros où il a rencontré Mathieu Rigal (peintre de très grand talent né à Fontanes dans le Lot en 1719). Antoine Serres décède en 1805, son frère Pierre hérite de la fabrique mais il en confie la direction à Jean Moytié jusqu’en 1822. La fabrique est vendue ensuite à Jean Jérôme Verdier, dit “Larroche”, 4ème fils de Géraud Verdier. Jean-Jérôme Verdier était fabricant de faïences à Mondou également. Début 1817, il quitte Auvillar pour Montpeyroux, puis revient diriger la fabrique de la Rue Jonqua. Il décède en 1846 et ses deux fils lui succèdent : François Maxime et François Isidore. François Isidore quitte la fabrique pour acheter celle de Pommadère au Port. François Maxime reste rue Jonqua mais les affaires déclinent. En 1870, il fabrique des tuiles mécaniques. Il décède en 1875, année de la grande crue de la Garonne. Son fils signe deux baux, avec Antoine Labau, fabricant de poteries grises et avec Alexandre Escarnot, fabricant de poteries. Enfin, la faïencerie est vendue à Jean Bréjoux en 1887, qui est originaire d’Eymet en Dordogne. Son fils Jean, qui se fait appelé André travaille à ses côtés. Jean Bréjoux est un céramiste reconnu, comme en atteste la médaille obtenue au salon de l’agriculture et des Beaux-Arts de Bruxelles en 1888. L’entreprise ferme ses portes en 1903.

Fabrique Rue Jonqua (en jaune)
Assiette de Maxime Verdier
Service de Bréjoux

Faïencerie de la Rue de l’Argenterie

Géraud Verdier, peintre sur faïence dans la fabrique Ducros, créée sa propre fabrique vers la révolution au quartier de Pintois/rue de l’Argenterie. Il est le père de 5 garçons, qui seront tous fabricants de faïence, notamment Jean Jérôme dit le 4ème qui sera à la fabrique rue Jonqua.

Fabrique Verdier Géraud à Pintois
Assiette estimée de la fabrique de Géraud Verdier suite découverte de tessons correspondants lors de travaux de voirie en 2017

Faïencerie du Port

Un ancien tourneur de la fabrique Ducros, Henry Joseph Landauer, originaire des Flandres, né en 1751 à Bruges, arrive à Auvillar en 1784. Il se marie en 1785 avec Rose Codet, de Saintes. Le frère de Rose, Pierre Codet, est fabricant de faïences à Valence d’Agen, entre 1783 et 1789, au quartier du Clos. En 1787 ou 1788, il créée sa propre fabrique au Port à la Brague. Henry Landauer décède à Bordeaux en 1811 et c’est sa veuve et son fils ainé Jacques qui gèrent la fabrique. La fabrique est vendue à Jean Papin, propriétaire à Bordeaux, en 1817, qui la revend à Jean Pommadère en 1818. Ce dernier décède en 1827 et c’est sa veuve Catherine Verdun qui lui succède. Catherine Verdun décède en 1845, et la fabrique est finalement revendue à François Isidore Verdier, dit Isidore Verdier. Le fils d’Isidore prendra la suite de l’exploitation jusqu’en 1875, puis elle est vendue aux enchères en 1876.

Fabrique Landauer
Assiette attribuée à Landauer (sous réserve)

Faïencerie de la Rue Clavet, quartier de la Papayette

Jean Verdier cadet, un des fils de Géraud Verdier, installe une faïencerie en 1801 rue Clavet, d’abord en location avec un de ses frères Jean Vital ainé, puis la rachète en 1805, mais décède peu de temps après. Son frère va continuer à exploiter la fabrique. En 1809, la fabrique est reprise par Joseph Castex, associé à Dominique Pons. Chacun d’eux ouvriront bientôt leur propre fabrique.

Fabrique rue Clavet

Deuxième faïencerie de Papayette

Dominique Pons se lance lui aussi dans l’exploitation d’une fabrique, non loin de celle de Jean Verdier Cadet, en bas du quartier de Papayette. Il sera aidé par son fils ainé Jean, et la fabrique finira par être gérée par son autre fils Jean Lucien, jusque vers 1855.

Fabrique Pons
Assiette de Dominique Pons

Deuxième faïencerie du Port

En 1815, Jean Pommadère, ancien ouvrier et tourneur chez Landauer, installe sa propre fabrique au Port. Il y restera 3 ans puis rachète celle de Landauer décédé en 1811.

Moule de Pommadère

Faïencerie de la Rue de la Sauvetat

François Verdier 5ème fils de Géraud Verdier installe sa fabrique vers 1820/1822 rue de la Sauvetat. D’abord faïencier, il devient aubergiste vers 1811. Suite à des difficultés financières, il revient à son premier métier suite au décès de sa mère. Vers 1840, il redevient simple ouvrier en faïence suite aux mauvaises années à la tête de sa fabrique.

Faïencerie rue de Marchet

En 1807, Joseph Castex créée sa fabrique rue de Marchet. Ce sera l’une des plus importantes fabriques à Auvillar, avec deux fours. Il restera à la tête de sa fabrique jusqu’à sa mort en 1868. Importante figure locale, il sera maire d’Auvillar de 1851 à 1865.
Joseph Castex vivait avec son frère Pierre, sans profession. On suppose que c’est ce Pierre Castex qui aurait réalisé l’extraordinaire cahier de gouaches, qui contient 64 peintures de modèles pour peintres sur faïences : décors de roses, oiseaux, paniers, architecture, fleurs. A découvrir ici.
En 1869, le petit-fils de Joseph Castex, également prénommé Joseph dirige la fabrique jusqu’en 1874/1875. Ce dernier signait en creux le revers de ses faïences par “JhC” et “JC”.

Fabrique de Joseph Castex
Décor issu du cahier de gouaches de Pierre Castex,
frère de Joseph Castex.
Terre vernissée de Joseph Castex (petit fils)

Deuxième faïencerie rue de la Sauvetat

Antoine Charme Castex, dit “Castex Charme”, tonnelier, se marie avec Antoinette Verdier, fille de Jean Verdier ainé. Arrivé dans une famille de faïenciers, il se reconverti dans la fabrication de faïences dans la maison de son grand-père. En 1844, il rachète la fabrique Ducros. Il n’a pas de lien de parenté avec Joseph Castex.

Fabrique Castex Charme
Plat à barbe de Castex Charme

Faïencerie de l’ancienne gendarmerie au Port

Gaubert Verdun installe sa fabrique au Port en 1838. Il est le frère ainé de Catherine Verdun, épouse de Jean Pommadère, qui dirige une fabrique tout près. Gaubert Verdun dirigeait déjà une fabrique de faïence de l’autre côté de la Garonne, à Espalais, depuis 1824. Il s’associe avec son gendre Arnaud Ortalon. La production est marquée “VO” pour Verdun/Ortalon. En 1864, Elisabeth Verdun, veuve Ortalon, baille à ferme la fabrique à Etienne Marseille et Antoine Labau. La production sera marquée par les M et L collées (voir page sur les marques).
Antoine Verdun, un autre fabricant de faïence du port rachète la fabrique en 1872, et la dirigera jusqu’en 1877.

Plat Verdun/Ortalon

Faïencerie Duffaut

En 1842, Pierre Duffaut crée une fabrique rue de Marchet, non loin de la fabrique de Joseph Castex. D’abord associé avec Louis Téchiné, qui a épousé sa fille Louise, mais ils se séparent à l’amiable un an plus tard. Pierre Duffaut cède vers 1850 sa fabrique à son gendre Bernard Billès, qui quitte finalement Auvillar pour être potier à Rabastens-de-Bigorre. Bernard Billès baille à ferme la fabrique d’Auvillar à Antoine Jonqua, potier.

Fabrique Duffaut
Plat fabrique Pierre Duffaut

Faïencerie André Carra

En 1842, André Carra installe sa fabrique dans le quartier des “Bourdettes”. Il est originaire de Ponsas dans la Drôme. Il arrive à Auvillar en 1828 et se marie avec la petite-fille de François Ducros, Jeanne Pimpeterre. Il exploite la fabrique avec son fils Louis jusqu’en 1865, année où la fabrique est baillée à Pierre Verdier jusqu’en 1872.

Faïencerie Louis Téchiné

En 1849, Louis Téchiné installe sa fabrique à Embatlarègue. Il crée en 1864 une société avec son fils Jean Félix pour gérer la fabrique. Il décède en 1870 et son fils devient seul gérant de la production jusqu’en 1878. Il baille à ferme la fabrique à François Détours. Ce bail n’ira pas à son terme, et la fabrique sera vendue en 1881 et ne reprendra pas d’activité. Les terres vernissées de Louis Téchiné ont une marque en creux “LT”.

Fabrique Téchiné
Plat en terre vernissée de Louis Téchiné

Poterie Maurer

En 1853, Philip Maurer, déjà référencé comme faïencier en 1830, est autorisé à établir un four à poteries brute sans vernis au Port. En 1839, il était fabricant de faïences à Caussens dans le Gers, jusqu’en 1845. Il revient ensuite à Auvillar et travaille à son four pour les compte d’autres fabricants auvillarais : Saint-Martin, Marseille et Labau, Antoine Verdun, Isidore Verdier.

Extrait du livre de comptes de Philip Maurer

Faïencerie Labau

Antoine Labau crée sa fabrique au lieu-dit “Canel” en 1868. Il gère également la fabrique des Verdier rue Jonqua à partir de 1879 par un bail à ferme. Son fils Etienne reprend la suite jusqu’en 1900. La fabrique est ensuite vendue à Antoine Coupeau, qui dirigera la fabrique jusqu’en 1909. Ce sera la dernière fabrique d’Auvillar.

Fabrique Labau
Morceau de vase fabrique Labau
Vase fabrique Labau

A l’étude des propriétaires successifs des fabriques d’Auvillar et de leur personnel, on est frappé par l’extraordinaire imbrication des membres des diverses familles de faïenciers, tous apparentés, si l’on excepte la famille Pons et les fabricants du Port. Sans doute faut-il trouver là une des raisons de l’homogénéité et de la cohérence de la production auvillaraise, tant au niveau des formes utilisées que des décors.